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Je me suis fait croquer

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Ce matin dans le train m'amenant au boulot un jeune homme se met en face de moi puis, quelques instants après, sort un cahier de croquis. Cette activité pour un voyageur ne fait pas partie des plus courantes, je lève donc un sourcil curieux. Quelques mots sont jetés sur une des pages que je ne cherche pas à lire. L'autre page est vierge.

Je retourne à mon livre.

Une station plus tard, je jette, tout en tournant une page, un regard vers le cahier. Celui-ci est à présent parcouru par un feutre qui, d'après les mouvements, est en train de faire un croquis. Je me recale un peu, façon peu discrète pour jeter un coup d'œil. C'est encore très brouillon et je ne distingue rien, d'autant plus que le dessinateur relève légèrement le cahier ; façon peu discrète de cacher ce que l'on fait.

J'esquisse un sourire : si ça se trouve, je suis le sujet du croquis.

Je replonge dans mon livre.

Entre les paragraphes, je jette un regard. Les formes se précises et je reconnais le front dégarni, les cheveux en arrière sur le dessus de la tête, la tête penché qui mettent les yeux au dessus des verres des lunettes et surtout, cette position du bras qui fait que le poing remonte la joue.

En effet, c'est moi. Dans la position de lecture appuyé contre la fenêtre, lorsque le croqueur a pris place dans la rame quelques stations plus tôt. Je ne peux juger à l'envers de la ressemblance exact, mais la pose, l'allure général y est.

L'homme referme le cahier et sort.

Sentiment étrange que d'être couché sur papier, spontanément et sans permission par un inconnu. Mais demander la permission, si cela avait été plus poli, aurait fait perdre à ma pose cette spontanéité. L'inconnu lui-même savait qu'il pouvait gêner, sa volonté de toujours mettre son travail hors de mes yeux le trahissait.

Mais au final, je ne suis pas mécontent. J'aurais été agacé si j'avais été pris en photo. Ici, le croquis me représente sans être exactement moi. Et cette façon de croquer spontanément est un exercice chez le dessinateur que j'admire un peu.

Un collègue m'avait, il y a quelques années, dessiné de profil en quelques traits. Une évocation de ma personne devant son ordinateur. Je ne sais pas si j'ai encore le dessin, mais j'avais trouvé cela amusant.

Si un jour par un hasard extraordinaire, l'inconnu croqueur venait à passer par cette page, j'aimerais qu'il contente ma part narcissique et m'envoie une copie du dessin.

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